Nagoya – Inuyama – Yamashiro
Rencontrer un Japon traditionnel et ancien ne m’était pas arrivé depuis un bon moment. J’ai visité Kyoto plusieurs fois mais pas la région nord du centre du pays. C’est en discutant avec maman (qui n’habite pas au Japon) que l’idée est venue d’aller à la rencontre d’un pays que je ne connais que trop mal. Avec Noriko, nous pensions aller à Taiwan mais – comme en Chine – les touristes ne peuvent pas louer de voiture, ce que je voulais faire coûte que coûte, Taiwan a été repensé… Comme à Kyushu ou au fin fond du Cambodge ou de la Thaïlande, je ne me lasse pas de me déplacer à mon rythme et de m’arrêter selon mes envies.
Le propos devint donc de se déplacer en shinkansen jusqu’à Nagoya et de récupérer une voiture sur place pour faire un grand tour: Nagoya → Yamashiro → Kanazawa → Shirakawago → Takayama → Nagoya. Nous savions déjà avant de partir que 4 jours seraient trop rapides mais nous n’avions pas le choix, emploi du temps oblige.
En ce lundi 29 mars, le réveil fut un peu trop tôt. Mon corps réclamait encore du repos après la semaine à la Japan Fashion Week qui m’avait harassé! Le train au départ de la gare de Tokyo était à 10h03 et il fallait se réveiller donc tôt.
Arrivés un peu avant l’heure du départ, nous cherchons un guide pour Kanazawa dans une des librairies de la gare. La pléthore rend le choix difficile et l’heure avançant, nous finissons pas prendre celui qui semble le mieux… Après avoir acheté des boissons, nous commençons à chercher le quai du train. Dans cette immense gare, le lieu du départ n’est pas toujours évident. Il y a plusieurs entrées en fonction de la destination. Contrairement à Paris par exemple qui propose une gare en fonction de la région. Comme tout est regroupé dans la gare de Tokyo, il faut connaître le nom de la région où l’on se rend. Si cela paraît évident à lire, cela reste une expérience très différente quand on se retrouve dans la gare, le stress de l’heure de départ approchant, les valises dans les pattes et sa géographie japonaise remise en question face à tous ces panneaux qui vous submergent d’informations…
Installés dans le train, nous remarquons une femme de la soixantaine avancée qui nous regarde du coin de l’oeil, qui se lève et se rassoie plusieurs fois en se justifiant qu’elle n’est pas assise à côté de son amie qui est un peu plus loin. En revenant des toilettes, un peu après Shizuoka, je constate le dictionnaire électronique franco-japonais mis en évidence sur ces genoux.
– Vous parlez français? lui demandé-je en japonais.
– Je m’excuse, je n’ai pas pu m’empêcher de vous écouter quand vous parliez répond-elle en français.
Elle saute véritablement sur l’occasion pour parler, elle qui n’a jamais l’occasion de le faire dans la langue de Molière comme elle nous l’explique. Bien que gentille, elle nous tient la jambe pendant tout le trajet jusqu’au notre destination. En descendant du train, nous connaissons un bonne partie de sa vie: elle vient de rentrer au Japon après 32 ans aux États-Unis entre NY, LA, Atlanta et j’en oublie pour suivre son mari… Avant cela, elle était dans un couvent espagnol à Paris, rue St Didier, juste à côté de chez ma grand-mère. C’est l’explosion de joie.
– Oh my goodness! C’est incroyable! Quelle coincidence! Le couvent existe toujours?
– Euh… Il faudrait demander à ma grand-mère…
Même si elle fait des efforts pour se rappeler son français, sa conversation est tout à fait correcte. À chaque mot que je traduis de son japonais ou anglais, elle le note dans un petit carnet « ma tête vous comprenez! »
– Comment parlez français à Tokyo?
Noriko lui explique plusieurs possibilités et ce qui m’amuse le plus, c’est que les deux femmes communiquent en français. Noriko lui parle en français car elle sent bien son envie de l’écouter et de l’utiliser.
Arrivés à 12h10 – ou 260 km plus tard, nous traversons la ville… ah non c’est la gare?! pour trouver un restaurant de miso très connu. La gare est une autarcie de 41 km², ce qui fait d’elle la plus grande du monde! Absolument hallucinant! Plus grande que la gare de Tokyo ou Shinjuku que je trouve déjà immense. Ici, il y a tout (magasins grands et petits, restaurants, hôtels…) et tous les types de bipèdes urbains: salarymen, jeunes qui traînent, femmes au foyer, personnes en transit, voyageurs, que sais-je!
En mettant le nez dehors, nous apercevons une magnifique tour en spirale – ça tombe bien elle s’appelle « Spiral tower » – et elle appartient à l’école de mode. Décidément, cette école est hallucinante pour les moyens dont elle dispose et les bâtiments qu’elle fait construire. La tour Cocoon avait eu droit à un article spécial sur mon blog.
Le restaurant – Yabaton – est recommandé dans le guide Michelin (le vert, pas le rouge!) et il est bon! On y mange des miso-katsu, des grillades de porc avec la fameuse sauce de miso, une spécialité de la région. Comme c’est l’heure du déjeuner et en raison de la notoriété de la maison, il nous faut faire la queue.
Une fois nos forces retrouvées, nous allons récupérer la voiture juste en bas, mais de l’autre côté. C’est pas grave, on retraverse la gare!
À côté de Nagoya, à 25 km, se trouve le château d’Inuyama attribué de deux étoiles dans le guide vert et je propose d’aller le voir. Il est au nord et c’est justement notre direction pour Yamashiro. Seulement à mi-chemin, il n’y a plus d’autoroute, juste une nationale à deux voies et les véhicules s’entassent. Le château – le plus vieux du Japon – est assez petit et plutôt mignon. Pour y arriver, on passe par une rue ancienne qui nous donne une idée de ce qui nous attend pour les jours à venir. À l’intérieur du château, tout en bois, un magnifique pilier central découpé à la hache supporte la structure. Les escaliers très raides me rappelle l’appartement du Ranelagh de papa. Je les monte et descend facilement par force d’habitude alors que les gens font très attention et s’aident de leurs mains pour grimper. Il a été rénové dans les années 60 ce qui fait que son aspect extérieur est un peu trop neuf pour moi mais il me plaît beaucoup. Les quelques cerisiers en fleur autour reposent sous un grand soleil et la température est douce. Nous nous réjouissons d’avoir des cerisiers pour notre voyage.
Nous visitons ensuite les deux temples juste à côté avec leurs portes rouges en enfilade. Nous terminons par la « grand-rue » pour voir les vieilles maisons et les boutiques. Un magasin de céramiques nous intrigue par sa vétusté et la beauté des pièces dans la vitrine. Il est malheureusement fermé.
Vers 16h, je m’inquiète du temps nécessaire pour aller à Yamashiro et l’hôtel où nous passons la nuit. Sur le site de celui-ci, il est indiqué qu’il faut deux heures depuis Nagoya or elles se transforment en 3h selon le GPS. De plus, pour reprendre l’autoroute, il faut repasser par Nagoya… Je me suis bien trompé sur la direction. Certes Inuyama est au nord mais pas du tout sur le chemin et la nationale prise à l’aller est toujours aussi étroite et remplie de véhicules. Je peste contre moi-même car j’aurais voulu arriver plus tôt dans le superbe endroit qui nous attend.
Nous filons enfin vers le nord, vers les montagnes. Leur puissance sur la météo a toujours quelque chose de fascinant. À la sortie d’un tunnel, dans les montagnes de Gifu, le temps est transformé: couvert, des nuages gris ou sombres et quelques minutes plus tard: la neige… Nous étions avec les cerisiers, le soleil et une quinzaine de degrés il y a un peu moins d’une heure… Un peu plus tard, nous sommes pris dans une tempête! Le vent s’engouffre sous la voiture, la neige s’écrase violemment sur le pare-brise. Nous avons été téléportés! nous sommes en fait en Sibérie!
La météo ne nous empêche pas d’arriver 3 heures plus tard, à Yamashiro onsen pour le ryokan Shiroganeya. L’endroit est époustouflant et Noriko découvre la surprise. Je ne voulais pas lui dire où nous resterions afin qu’elle soit étonnée. L’histoire de cet « hôtel » remonte à 400 ans durant l’époque Edo. Cependant le lieu a été intelligemment décoré avec un design moderne qui se marie harmonieusement avec la tradition japonaise: tatamis, futon, cuisine, cérémonie du thé, jardin… Le personnel est au petit soin dans le plus grand style du service à la japonaise. La chambre est vaste et belle dans tous ses détails. La salle à manger est composée de petites salles privées et les employés posent les plateaux sur la longue table magnifique de la pièce principale avant de les apporter. Le dîner – kaiseki – est à nous faire pleurer! À seulement une quarantaine de kilomètres de Kanazawa existe un endroit magique. Nous aurions vraiment dû arrivés plus tôt pour en profiter davantage. Surtout que le onsen est délicieux et particulièrement agréable pour s’y prélasser. Nous y allons après le repas avant d’éteindre les feux, les yeux brillant du bonheur d’être là.
Yamashiro:
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Voici la galerie de photos du 29 mars.
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Super, le retour de tes petites balades. L’hôtel à vraiment l’air génial, j’adore 😉
J’attends la suite impatiemment…Intéressante proposition que ce poisson cuit dans la terre…!
Merci à vous deux.
Plus de photos de l’hôtel dans la journée suivante Réginald. 😉
wow, ça donne vraiment envie !!!
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