Nous avons pris un avion jusqu’à Okayama (un peu moins de 600kms à l’ouest de Tokyo) pour nous rendre sur l’île de Naoshima après avoir pris un train puis un ferry.
Naoshima
On va à Naoshima pour faire le plein d’art contemporain. Imaginez un musée en plein air à l’échelle d’une île ! Avec un musée dessiné par Tadao Ando en prime ! La folie pure ! Tellement enthousiaste qu’on ne sait plus par où commencer pour raconter. Il y a trois zones à visiter.
Le bateau nous débarque à Miyanoura, une ville sans intérêt particulier si ce n’est son bain public (直島銭湯) décoré par Shinro Ohtake. Le bain public est une institution culturelle au Japon et la touche délirante d’Ohtake est une belle provocation, une belle collaboration entre une tradition solidement ancrée dans les mœurs et une démarche artistique kitschissime. Un kitsch comme j’adore : ridicule sans être grotesque, des mélanges de matières et de couleurs vives, des détails et des objets rétro… des associations que j’adorerais faire dans mes toilettes. Le premier bain public où j’ai eu plaisir à rester aussi longtemps que quand je visite un musée et souhaite profiter pleinement des œuvres. Un bain public qui vous donne une banane sur le visage. Chaque chose est pensée, travaillée, rien n’est oublié, de l’extérieur à l’intérieur, du pommeau de douche à la chaudière et son escalier d’accès (dans un bâtiment séparé). Son nom I♥湯 est en fait un jeu de mot avec le caractère chinois qui se prononce « you » et qui signifie « eau chaude », l’élément principal d’un bain public.
L’autre chose à voir à Miyanoura est la citrouille rouge à pois noirs de Yayoi Kusama, juste à côté du ponton des ferries. On peut même entrer dedans et le soir, s’amuser de l’ambiance halloween de l’éclairage au sol. Aaaaaah Yayoi Kusama… la p’tite vieille à la perruque colorée qui voyage dans l’espace et qui est obsédée par les pois. J’adore ! Approcher les deux citrouilles de Naoshima, poser ma main dessus comme Armstrong sur le sol lunaire composait un rêve dont je souhaitais follement la concrétisation.
Toujours au même endroit, le soir, nous sommes allés manger un curry japonais chez Cin.na.mon avec son intérieur bien pensé, aux chaises très design et à la bouffe correcte. Très bien pour se restaurer sachant qu’il n’y a pas grand chose sur l’île surtout après 20h… On peut même y passer la nuit.
Au sud, la zone de la Benesse house avec le musée d’art Chichu, le musée Benesse house, le musée Lee Ufan et des œuvres en extérieur deci-delà au gré de la balade. Des pièces de Shinro Ohtake, Yayoi Kusama, Nikki de Saint Phalle, Walter de Maria et autre… Là, c’est la claque qu’on n’a pas vu venir ! C’est le menton qui se décroche chaque fois un peu plus vers le sol… On commence avec le musée Chichu (sous terre) dessiné par Tadao Ando… rien que le bâtiment vaut le détour : immense puits de lumière en béton brut, dédale de couloirs, de salles et de cours. La vue satellite vous fera comprendre. En son cœur, Claude Monet, Walter de Maria et l’immense James Turrel. Certes, peu d’artistes, qui plus est pour un prix d’entrée élevé mais l’impact est tellement profond qu’on ne regrette rien si ce n’est qu’on voudrait en voir plus. Un peu plus loin, c’est le musée Benesse house avec là aussi du très lourd : James Turrel encore, Bruce Nauman, David Hockney, Andy Warhol, César, Giacometti pour ne citer qu’eux…
La chose un peu moyenne est que la zone autour de l’hôtel Benesse et de son musée est en fait privée. Pas de voitures ou de véhicules personnels et surtout, même pas de vélo ! Le truc qui m’a bien agacé ! On peut quand même marcher (Merci ô Grand groupe Benesse…) ou bien prendre une navette gratuite qui nous emmène d’un bout à l’autre. L’autre, c’est justement la citrouille jaune de Yayoi Kusama, un alien posé sur une jetée. On avait un peu les pieds dans l’eau mais je sautais partout de pouvoir la toucher, d’être enfin juste à côté. De là, on rentre à pied et on croise la boutique, un immense escalier de Walter de Maria, un ponton, des sculptures de Nikki de Saint Phalle, de la tôle trouée par Shinro Ohtake, des carrés métalliques dorant au soleil de George Ricky… jusqu’au musée Benesse house, lui aussi créé par Tadao Ando. Là, j’ai adoré 100 Live and Die de Bruce Nauman, les galets géants de Kan Yasuda ou encore l’installation de Donald Judd… Une balade magique !
Dernier endroit, le village de Honmura à l’est de l’île, à l’opposé de Miyanoura mais à 10-15 minutes en vélo. Dernier frisson émotionnel qui vous fait pousser des « Oooooh » d’enfant. Le village en lui-même est magnifique avec des maisons en bois très anciennes, parfois bicentenaires, dont les murs extérieurs sont brûlés pour les protéger contre les insectes xylophages. Très tranquille, on y croise parfois des habitants et on s’émerveille de toutes les vieilleries qui composent le décor. Le clou de l’endroit est composé de 6 maisons distinctes, restaurées et dans lesquelles on trouve une œuvre d’un artiste. En raison du temps disponible (elles ne sont visitables qu’entre 10h et 16h30), nous n’en avons fait que 4 : Kadoya avec Sea of Time de Tatsuo Miyajima, Kinza avec Being given de Rei Naito (uniquement sur réservation), Gokaisho de Yoshihiro Suda et le trip absolu, le shoot de l’extase : Minamidera avec Back side of the Moon par James Turrel. Nous en sommes ressortis abasourdis et en avons discuté pendant de longues minutes par la suite… Rien que pour cette superbe maison, il faut faire la queue et venir à Naoshima pour une expérience inoubliable. Mais comme toute l’île est incroyable, il faut absolument y aller !
Okayama
Pas grand chose à voir dans cette grande ville si ce n’est son jardin : Koraku-en, un des trois plus beaux jardins du Japon. Les Japonais aiment bien les trinités des « trois plus beaux quelque chose ». Nous connaissons Kenroku-en de Kanazawa, il reste désormais Kairaku-en à Mito… Au-delà de l’aspect commercialo-touristique de l’appellation, les deux que nous avons visités, il faut bien le dire, sont particulièrement beaux. Ce qui frappe à Okayama, ce sont les diverses cultures en plus de celles classiques des arbres et des fleurs… Il y a des rizières, du thé, des pruniers qui servent à faire un alcool de prune et un jardin exotique composé de cycas. Étonnant. Le tout parsemé de vieux bâtiments très beaux comme ryu-ten pour se reposer au bruissement de l’eau ou renshi-ken pour prendre un thé vert sous une grande ombrelle rouge.
Très différent, le vieux tramway du centre ville est à prendre pour retourner à la gare. Une plongée parmi les locaux tout à fait délicieuse et qui rappelle des souvenirs de Hong-Kong…
En prime et en cadeau Bonux, une vidéo d’il y a quelques années de Yayoi Kusama pour ceux qui ont le temps et souhaitent la découvrir. Attention au délire ! Et l’artiste n’a rien fumé avant le tournage… elle est toujours comme cela ! Enjoy ! (version japonaise sous-titrées en anglais) Pour les parisiens, le centre Pompidou organise une rétrospective Kusama jusqu’au 9 janvier 2012. Courez !
[flashvideo filename=video/Yayoi_Kusama.flv /]
Merci pour la découverte, de belles photos
Content que Naoshima t’ait tant plu.
Sinon, je me permets deux petites rectifications. Art House Project, c’est pas six bâtiments, mais sept (Ishibashi, Kadoya, Gokaisho, Haisha, Go’o Shrine, Minamidera et Kinza).
Quant au Korakuen, il n’est pas l’un des « trois plus beaux jardins » mais l’un des « trois grands jardins » un titre officieux n’ayant pas grand chose à voir avec un vrai classement. Comme tu le dis, les Japonais aiment bien les trois ceci ou les trois cela.
Bonjour bonjour,
Merci pour les remarques.
J’ai mis 6 maisons parce que la 7e est celle de l’office du tourisme et correspond moins à une maison qu’à un entrepôt pour moi.
Si je me fis à la brochure du jardin disponible à l’entrée et à plusieurs sites internet, on parle d’un « des trois plus beaux jardins » au Japon. Maintenant, si « beau » et « grand » sont synonymes pour certains, je peux le comprendre…
😉
Non, non, il y a bien sept Art Houses:
Ishibashi, Kinza, Minamidera, Gokaisho, Haisha, Kadoya et Go’o Shrine.
🙂
Ok, ok je comprends mais je répète ma remarque, je parlais de « maisons ». Maintenant, tu as raison, il n’y a pas que des maisons. hé hé 😉
LOL. Mais dans ce cas, des maisons, il y en a que trois: Ishibashi, Kadoya et Kinza.
Gokaisho était un salon de Go.
Haisha, un cabinet de dentiste.
Minamidera est tout neuf ou presque (construit pour l’occasion)
Go’o Shrine aussi.
😉
Qu’importe, on s’en fout, voyez entre les images !-))))))))) !
Merci, merci, merci….
Les petit pois sévissent en effet à Beaubourg…!
A déguster!
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(◎_◎;) 四国は、うどんが美味しいようです。
Pour moi le plus beau jardin est le Ritsuri-kouen à Takamatsu. En comparaison avec celui d’Okayama que j’ai visité le lendemain, il n’y a pas photo.
J’ai aussi beaucoup aimé Naoshima.
Bonjour Béné et merci pour tes commentaires.
Photos de voyage à Shikuko à venir… il y aura donc des clichés de Ritsurin koen, un jardin qui m’a bien marqué aussi.
Hello,
Merci pour ces infos, nous y serons dans 10 jours elles nous seront très utiles !
Bonjour Aleks.
Ravi de vous donner quelques pistes de visite. J’espère que vous aimerez comme j’ai aimé.
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